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Cinéma : « Freda » de Gessica Généus, le film qui regarde Haïti en face

Gessica Généus, réalisatrice de 36 ans, a sorti « Freda », son premier long-métrage sélectionnée au Festival des Cannes. Une plongée dans une Haïti populaire, à travers une galerie de personnages bien campés.

Ce film met en scène Freda, la vingtaine, qui vit dans un quartier populaire de Port-au-Prince avec sa famille. Sa mère tient une petite boutique de rue, son frère dépense les maigres économies familiales et sa soeur se blanchit la peau et court les boîtes de nuit pour trouver un bon parti. Freda, elle, suit des cours à l’université, où elle débat de la situation politique dans laquelle se trouve Haïti. Alors que son petit ami la presse de venir le rejoindre à Saint-Domingue, où il a fui après avoir pris une balle perdue, Freda veut croire en son pays.

En abordant à la fois la corruption politique, les émeutes, le patriarcat et le poids de la colonisation en Haïti, « Freda » brosse un tableau passionnant de la condition féminine dans ce pays caribéen. Au milieu d’une galerie de personnages féminins puissants(les hommes, eux sont relégués au second plan), Freda rayonne d’énergie et de courage.

Le film est choral, sororal, une célébration de ses héroïnes cabossées mais debout, souvent invisibles. « Toutes ces femmes qui existent dans le film, j’ai grandi avec elles ; cet univers, c’est vraiment le mien. Ma mère, mes tantes se sont énormément impliquées dans les combats de ce pays et on a l’impression aujourd’hui que ça va de pire en pire, explique Gessica Généus. Il y en a qui le supportent très mal, comme ma mère. Elle a complètement sombré dans la maladie mentale, la schizophrénie, la dépression. On est nombreux à prendre la situation du pays sur nous. On n’est pas juste haïtien, on est Haïti ».

Gessica Généus, qui vient du documentaire et par ailleurs comédienne, a tourné ce film en décor réel et dans l’urgence, en janvier 2020. Port-au-Prince est alors à feu et à sang. La population révoltée par la corruption, le laisser-aller de ses dirigeants, les souffrances quotidiennes, manifeste après avoir vécu un « Peyi Lock » , un « pays cadenassé », un confinement de plusieurs mois dû à l’insécurité. On s’enfermait alors pour éviter les gangs, la violence gratuite.