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Le secrétaire général de l’ONU consterné par la violence des gangs en Haïti

Le nombre d’homicides a plus que doublé en Haïti en 2023, avec près de 5.000 personnes tuées, dont plus de 2.700 civils, s’alarme mardi le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, « consterné » par la violence des gangs qui ravagent la population haïtienne.

« Je suis consterné par le niveau stupéfiant de la violence des bandes, qui continue de s’aggraver et qui détruit la vie des Haïtiens, en particulier à Port-au-Prince », la capitale, dénonce Antonio Guterres dans un rapport rendu public.

« Les meurtres, les violences sexuelles et les enlèvements commis par les bandes organisées, notamment contre les femmes et les jeunes filles, entre autres crimes, se poursuivent en toute impunité », ajoute-t-il.

Selon le rapport, « le nombre d’homicides signalés a augmenté de 119,4% en 2023 par rapport à 2022, 4.789 victimes ayant été déplorées, dont 465 femmes, 93 garçons et 48 filles, soit un ratio de 40,9 homicides pour 100.000 habitants, contre 2 183 en 2022, soit un ratio estimé à 18,1 homicides pour 100.000 habitants ».

Parmi ces personnes tuées, plus de 2.700 étaient des civils (et plus de 1.300 ont également été blessés) et plus de 1.600 des membres de gangs. Le document note aussi la poursuite du mouvement d’autodéfense né au printemps 2023, avec plus de 500 personnes lynchées pour avoir été accusées d’être membres de gangs. Le nombre de personnes enlevées a également augmenté, passant de 1.359 en 2022 à 2.490 en 2023, soit une augmentation de 83%.

Alors que les gangs étaient jusqu’à récemment principalement présents dans la capitale et sa banlieue, Antonio Guterres s’inquiète « de l’expansion rapide » de leurs violences dans des zones rurales auparavant épargnées, notamment dans l’Artibonite.

Ainsi dans ce département, « souvent, les bandes dressent des barricades sur les abords des routes et s’y cachent, ouvrent le feu sur les véhicules pour les arrêter, puis enlèvent les personnes survivantes. Lors de ces attaques, les femmes sont souvent violées en plein jour », décrit le rapport.
Les gangs continuent aussi de « recourir systématiquement à la violence sexuelle pour consolider leur domination sur les populations ».

Le document s’inquiète d’autre part de l’évolution des « tactiques » des gangs, évoquant notamment la pose par certains de « pièges sophistiqués », la construction de « casemates en béton dans leurs bastions pour repousser les opérations de police », et le recours à de faux uniformes de police pour les enlèvements. Dans ce contexte de terreur, d’habitants forcés de fuir ou de se cacher, le pays connaît une des « pires » crises alimentaires au monde. ¨

Plus de 4,35 millions d’Haïtiens, soit plus de 40% de la population, sont en situation d’insécurité alimentaire aiguë et les cas de malnutrition aiguë sévère chez les enfants ont augmenté de 30% en 2023 par rapport à 2022.

Face à cette grave crise sécuritaire et humanitaire, le Conseil de sécurité de l’ONU a donné en octobre son accord pour l’envoi en Haïti d’une mission multinationale menée par le Kenya afin d’aider la police haïtienne dépassée.

Le parlement kényan a approuvé en novembre le déploiement de 1.000 policiers, mais la mission reste suspendue à une décision de la Haute cour de Nairobi attendue le 26 janvier.

Dans son rapport, Antonio Guterres note que pour que cette mission « puisse avoir un impact durable », elle devra être accompagnée d’une « consolidation des systèmes judiciaire et pénitentiaire », ainsi que de solutions pour faire face à « l’usure de la police ».

Les effectifs de la police nationale continuent ainsi de diminuer « à un rythme alarmant »: en 2023, 1.663 agents de police, dont 152 femmes, ont quitté l’institution, 48 ont été tués, et 75 blessés. Au 31 décembre, la police comptait 13.196 agents, selon le rapport.
« Il est difficile d’exagérer la gravité de la situation qui règne actuellement en Haïti », résume Antonio Guterres.

« A ce moment critique de l’histoire d’Haïti, il est primordial que les parties prenantes haïtiennes se réunissent pour forger un large consensus autour d’une solution durable et inclusive propre à Haïti », plaide-t-il. Pour permettre, quand les conditions seront réunies, l’organisation d’élections, pour la première fois depuis 2016.