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TikTok pourrait être interdit aux États-Unis pour des soupçons d’espionnage

La Chambre des représentants américaine vient d’adopter un projet de loi prévoyant l’interdiction du réseau social chinois TikTok aux États-Unis, au cas où sa maison mère, ByteDance, refuserait de céder son activité américaine. Une décision qui reste conditionnée au vote du Sénat, et qui relance les soupçons d’espionnage de TikTok sur ses utilisateurs.

Soupçonnée d’espionnage par les États-Unis, la maison mère du réseau social chinois TikTok pourrait être contrainte de céder son activité américaine. 352 voix pour, 65 contre : à une très large majorité, la Chambre des représentants américaine a adopté le 13 mars un projet de loi contraignant ByteDance, maison mère de TikTok, à céder son activité américaine. En cas de refus de la firme chinoise, le réseau social pourrait tout simplement être banni des États-Unis.

Soupçons d’espionnage et de transfert des données personnelles en Chine

La mesure doit encore obtenir l’aval du Sénat, où certains élus s’opposent au bannissement du réseau social compte tenu de son extrême popularité. Si la décision est approuvée par les deux chambres législatives, ByteDance aura 180 jours pour vendre l’application. À défaut, elle sera exclue des boutiques d’applications d’Apple et de Google aux États-Unis.

Depuis plusieurs mois déjà, TikTok est dans le collimateur des autorités américaines : des responsables, républicains comme démocrates, estiment que la plateforme permet à la Chine d’espionner ses utilisateurs et de transférer leurs données personnelles. L’année dernière, le gouvernement fédéral des États-Unis et plusieurs États américains ont interdit le téléchargement et l’utilisation de TikTok sur les appareils professionnels de leurs employés.
Selon Hakeem Jeffries, chef de file des démocrates à la Chambre des représentants, le texte “n’interdit pas TikTok”, mais “vise à résoudre des questions légitimes de sécurité nationale et de protection des données liées aux rapports du Parti communiste chinois avec un réseau social”. L’ancien vice-président républicain Mike Pence est plus ferme : “Laisser TikTok continuer à opérer aux États-Unis alors qu’il est sous le contrôle du Parti communiste chinois est simplement inacceptable.”

170 millions d’utilisateurs actifs aux États-Unis

Aux États-Unis, la force de frappe de TikTok est colossale : sur 1,2 milliard d’utilisateurs actifs dans le monde en 2023, 170 millions étaient Américains (14%). Un porte-parole de TikTok a estimé que “ce processus a été mené en secret et le texte présenté en urgence pour une raison : il s’agit d’une interdiction. Nous espérons que le Sénat va prendre en compte les faits, écouter ses administrés et réaliser l’impact sur l’économie.”

ByteDance nie tout lien avec le gouvernement chinois, reposant une partie de son argumentaire sur la restructuration de sa société, afin que les données personnelles des Américains restent aux États-Unis. Un porte-parole de la diplomatie chinoise a toutefois déclaré, juste avant le vote, qu’une telle interdiction “saperait la confiance des investisseurs internationaux” et que cela reviendrait, pour les États-Unis à “se tirer une balle dans le pied”.

Si le projet de loi “sur la protection des Américains contre les applications contrôlées par des adversaires étrangers” est adopté par le Sénat, le président américain Joe Biden s’est dit prêt à promulguer le texte. Son rival républicain, Donald Trump, a quant à lui changé de posture sur le réseau social chinois. Alors qu’il avait pris un décret – ensuite retoqué – en 2020 pour l’interdire, évoquant une menace pour la sécurité nationale, il a déclaré, lundi : “Ce qui me déplaît, c’est que sans TikTok, vous allez faire grossir Facebook, qui est pour moi un ennemi du peuple”. Ce retournement de veste pourrait en réalité être lié à d’autres motivations : selon le New York Post, en cas d’adoption de la loi, l’un des principaux investisseurs de TikTok, le milliardaire Jeff Yass, pourrait ne plus contribuer au financement de campagnes électorales des républicains.

Un projet de loi conforme au premier amendement ?

En attendant le vote du Sénat, certains élus restent sceptiques sur le projet de loi, pour des raisons constitutionnelles et économiques. “C’est un texte trop général, qui ne va pas résister à l’examen du premier amendement, affirme Ro Khanna, élu de Californie à la Chambre des représentants. L’autre problème est que beaucoup de gens gagnent leur vie avec cette plateforme.” En décembre, l’État du Montana avait adopté une loi pour bloquer TikTok : une mesure bloquée par un tribunal fédéral américain, jugeant que le texte méconnaissait “les limites du pouvoir des États et ne respecte pas les droits constitutionnels des individus et des entreprises”.

Pour l’heure, l’interdiction de TikTok sur l’ensemble d’un pays n’a été prononcée qu’en Inde, en 2020, sans avoir été autorisée à nouveau. Un bannissement qui faisait suite à des affrontements à la frontière entre la Chine et l’Inde. Pour autant, de nombreuses institutions s’inquiètent de l’exploitation des données personnelles par la firme chinoise, comme la Commission européenne. Le 19 février, elle a annoncé avoir ouvert une enquête sur TikTok, le soupçonnant d’enfreindre le Digital Services Act (DSA), notamment sur l’accès aux données pour les chercheurs.